WWOOFing à Jangheung
A l’origine, j’avais prévu de faire uniquement du WWOOFing en Corée. J’en avais sélectionné trois. Mais finalement, j’ai décidé de changer mes plans, sans trop savoir pourquoi et ai voulu n’en faire qu’un. J’avais donc raccourci le temps de mon séjour à une semaine en WWOOFing, celui qui m’intéressait le plus a refusé de me prendre pour un temps si court. C’était un village communautaire où ils essayaient de faire des activités artistiques et culturelles. Dommage…
Donc, le choix se résumait à ceci : un temple bouddhiste de yoga et une ferme à Busan. Étant donné que c’était uniquement une ferme agricole, sans animal (c’était le côté qui m’ennuyait un peu plus au Japon), j’ai choisi le temple. Je pensais également qu’une petite initiation au yoga ne me ferait pas de mal !
Cela reste quelque peu douloureux de me rappeler mon séjour à Jangheung, car il ne s’est pas tout à fait passé comme prévu. Comme le Japon a eu son article négatif, voici le seul article négatif de la Corée. Mon WWOOFing n’aura duré qu’une semaine, mais il m’a semblé durer une éternité.
Je partais à Jangheung un peu excitée, mais comme chaque WWOOFing, un petit peu tendue de peur de mal m’entendre avec mes hôtes.
J’ai adoré traverser les campagnes coréennes, qui sont magnifiques (si on arrive à faire abstraction des innombrables déchets qu’il y a partout…). Après 3 heures de trajet, j’arrivais donc à Jangheung, à l’ouest de Yeosu, vers midi. Une moine du nom de Swami (un nom d’emprunt indien car elle a appris le yoga en Inde) est venue me chercher.
A la gare, j’ai été confuse car une dame est venue me voir en me prenant la main et j’ai d’abord cru que c’était mon hôte. Bien sûr, je ne comprenais rien de ce qu’elle me disait, et j’ai commencé à la suivre, mais elle m’a alors regardée étrangement alors j’ai vite compris que ce n’était pas elle.
Tout à coup, une grande personne est arrivée avec une capuche et une tenue assez masculine. Alors j’étais encore plus confuse. Elle était assez brusque, et son anglais très difficile à comprendre au premier abord. Plus tard, elle m’a raconté qu’elle avait appris l’anglais en Inde et je crois qu’appris est un bien grand mot. Nos interactions étaient alors assez limitées car j’avais toujours peur qu’elle ne comprenne pas ce que je voulais dire, ou pire, l’interprète mal.
Elle paraissait brusque, mais elle semblait également attentionnée, même si elle ne savait pas trop comment le montrer.
A mon arrivée, j’avais une maigre consolation : elle avait deux chiens, que je pouvais caresser à ma guise. Mais là encore, les chiens avaient l’air affreusement malheureux, et elle ne comprenait pas pourquoi ils m’aimaient tant. Peut-être simplement parce que je prenais un petit peu de temps pour m’occuper d’eux ?
Le premier jour s’est déroulé assez calmement, puisqu’elle m’a laissée me reposer du trajet pendant deux heures et comme elle recevait une invitée, je suis restée dans ma “chambre”. Je pense que l’on pourrait plutôt l’appeler chambre froide, puisque comme tout temple qui se respecte, l’isolation est très mauvaise. De plus, mon lit était un lit “imitation marbre” (je cherche toujours l’intérêt) à plaques recouvert d’une simple couverture. Je pense que j’aurais dormi par terre, c’eût été plus confortable. Ses plaques étaient chauffantes, enfin une sur deux fonctionnait, mais même si c’est très courant au Japon et en Corée, je n’aime pas trop ce concept de couette chauffante, ou maintenant lit chauffant. Puis, je doute que ce soit très bon pour le corps !
Le lendemain, après un petit peu de nettoyage dans les alentours du temple, nous sommes allées rendre visite à d’autres moines, d’abord dans la province d’Iljiam puis sur l’île de Wando. Ca, je ne pourrais pas lui reprocher, elle m’aura fait pas mal visiter les alentours !
Par ailleurs, c’est durant ces escapades que j’ai réalisé que les paysages de montagnes plus nouvelles, plus rocheuses me manquaient. En effet, la Corée, ainsi que le Japon, sont des pays très montagneux, mais ce sont généralement des petites montagnes verdoyantes. Elles ont elles aussi leur beauté, mais j’admets que l’immensité de nos montagnes, par exemple, me touche beaucoup plus. J’ai pu donc voir une montagne de ce style, et j’en suis très heureuse.
Le premier moine était un maître de thé, le temple était selon toute vraisemblance célèbre dans le milieu et aurait appartenu à un grand maître de thé. Après avoir bu le thé de leur production, nous avons été voir des moines spécialisés dans le yoga (comme Swami). Plus tard, avec sa femme, professeur de yoga elle aussi, nous avons été acheter du poulpe et autres fruits de mer que nous avons dégustés le soir. Elle était très gentille, j’aurais aimé faire mon WWOOFing plutôt chez elle…
Les journées de travail se ressemblaient beaucoup, je rangeais un local qu’elle voulait débarrasser, ou déblayer les bambous qu’un homme coupait. Mais je faisais principalement du jardinage, comme enlever les mauvaises herbes (à la bêche ou à la main). Mais la plupart du temps, les journées étaient courtes car il neigeait au moins un jour sur deux. Il faisait souvent très froid, donc il était difficile de travailler dans ces conditions. Alors j’étais cloîtrée dans ma chambre glaciale.
Toutefois, la nourriture était toujours délicieuse. C’étaient souvent des sortes de ragoûts où elle mélangeait du riz, du tofu, de la viande et leur aliment favori : le kimchi. C’est du chou mariné et épicé qu’ils mangent comme accompagnement, mais qui se trouve à chaque repas ! On pourrait le comparer à notre pain.
J’ai tout de même appris des choses intéressantes, comme la préparation du miso (qu’ils font souvent en soupe). Tout d’abord ils le font sécher en gros blocs, qui sont relativement lourds et très durs, qu’on entoure de tresses de pailles pour les transporter facilement. Ensuite, pendant quelques mois, on les met dans des très grands récipients en forme de vases et remplis d’eau, après les avoir préalablement nettoyés pour enlever la paille collée. Je dois admettre que même cette expérience qui aurait pu être extrêmement enrichissante m’a parue très désagréable, car au lieu de m’encourager, Swami ne faisait que des reproches du style: “mais tu mets de l’eau partout !”, “arrête donc de secouer le miso dans tous les sens de cette façon !!!”. Il faut savoir qu’en Corée, comme au Japon, il faut toujours enlever ses chaussures pour rentrer dans un bâtiment et l’entrée est assez surélevée. Ce qui fait que oui, je gardais les seaux dans mes mains quand je descendais mettre mes chaussures. L’autre femme qui était venue aider n’arrêtait pas de me dire des choses en coréen que je ne comprenais pas, bien évidemment. Également, à un moment, certains blocs étaient par terre en travers de mon chemin. Et bien, ma culture de petite française m’a fait enjamber les blocs. A ce moment j’ai cru que le monde s’arrêtait. Elles se sont toutes les deux mises à crier. Je pense qu’elles auraient pu me pousser et caresser les blocs dans leur bras. Swami m’a alors crié “elle vient juste de te dire que c’était de la nourriture traditionnelle !!! Ca ne va pas bien, on n’enjambe jamais de la nourriture traditionnelle !!!”. Alors pour ma défense, ça ne ressemble en rien à de la nourriture, je doute que le palier soit plus propre que mes chaussettes et enfin, je ne parle pas coréen, ainsi je n’aurais jamais pu comprendre ce que m’avait dit la femme.
Enfin, des événements de ce genre se passaient à peu près tous les jours. Mes seuls réconforts étaient Shanty et l’autre chien dont elle ne m’a jamais donné le nom. Ce dernier avait par ailleurs beaucoup de mal à marcher et quand je lui ai dit, elle l’a juste regardé et déclaré “tu as du mal à marcher ?” et est partie…Ils dormaient tout le temps sous la neige.
Une autre WWOOFeuse, Min Ji venant de Seoul est arrivée ce soir-là. Nous sommes donc allées toutes les quatre, Swami, son amie, Min Ji et moi, au jimjilbang, les bains publics. Une fois encore, les Coréens ont moins de réserve que les Japonais, et les Coréennes ne se gênaient pas pour regarder mon corps d’occidentale.
Et ce n’était toujours pas fini ! Min Ji semblait frêle et très peu habituée à la campagne. C’est vrai qu’elle avait l’air d’avoir son caractère, mais elle semblait aussi gentille et patiente. Elle devait rester quinze jours. Elle est partie au bout de deux jours. Elles ne s’entendaient absolument pas (vraiment étonnant…). Le soir, Swami s’est d’abord excusée auprès de moi, m’a avoué qu’elle avait vécu seule pendant très longtemps et qu’elle avait désormais du mal à gérer ses relations sociales. Je l’avais remarqué. Mais c’était appréciable de recevoir des excuses. Après, elle a passé une bonne partie de la soirée à critiquer Min Ji, du genre : “Je faisais de l’humour, elle le prenait mal”. Mais je n’avais aucun mal à imaginer le type d’humour.
La fin de ma semaine s’est déroulée toujours sur le même modèle, beaucoup de jardinage, beaucoup de repos à cause du froid, et beaucoup de bains publics que j’appréciais beaucoup. Nous sommes allées manger une sorte de zenzai coréen (pâtes épaisses dans de la soupe de haricots rouges) chez les voisins un midi, et j’ai même vu une partie du journal de France 2, car la télévision coréenne montre quelques JT internationaux ! Même si en général je déteste les JT, cela m’a mis du baume au coeur (si un jour on m’avait dit que voir Delahousse me ravirait, j’aurais rit grassement). Enfin, la veille de mon départ, elle m’a emmenée voir un temple avec des centaines de statues de bouddha. Et je dois bien l’admettre, elle m’a emmenée dans le meilleur restaurant coréen où j’ai eu l’occasion de manger de toute ma vie !
Le jour de ma libération (je l’ai vécu comme tel), son fils Jin Jae m’a donné un cours de yoga de deux heures. C’était très intéressant, ses explications en anglais étaient très claires et il était bien plus sympathique que sa mère. Elle m’a emmenée à l’arrêt de bus en me remerciant, j’ai fait de même, mais là où d’habitude je demande à prendre une photo et m’attarde pour vraiment leur faire comprendre que je leur suis reconnaissante, je suis partie vers mon arrêt sans me retourner.
Un commentaire
Jauralde
Désolée que ta dernière semaine se soit si mal passée.
Il faudra que tu m’expliques un jour ce qu’est le miso, comment on le fait, quand on le mange car je ne connais pas du tout sa composition .
Je voudrais aussi avoir des précisions sur « la femme moine » et d’une façon plus générale sur la religion, car pour mon esprit français il est curieux de constater que la moine a un fils et vit un peu comme tout le monde. Tu pourras satisfaire ma curiosité au Portugal.
A bientôt donc et merci de nous renseigner sur des cultures qui ne nous sont pas du tout familières. Nous t’embrassons.